« J’ai été un terroriste et je ne m’en excuserai jamais » : Mehdi Nemmouche condamné à la prison à perpétuité dans le procès des geôliers de l’État islamique


Le verdict était très attendu. Feuilles à la main, devant la cour d’assises spéciale de Paris, les derniers mots de Mehdi Nemmouche avant le verdict, ce vendredi 21 mars, s’enchaînent. L’accusé ne s’excusera « jamais » d’avoir été « un terroriste », d’après les propos rapportés par l’AFP, insistant sur le fait qu’il ne regrettait « pas un jour, pas une heure, pas un acte ». Il martèle qu’il n’a « fait que combattre le dictateur Bachar al-Assad » en participant à la libération du peuple syrien de la dictature, selon lui rendue possible « par le terrorisme ».

Jusqu’au dernier moment, Nemmouche maintient sa position : il n’a « jamais été » le geôlier des otages occidentaux, et n’a « jamais rencontré ces personnes en Syrie », s’autoproclamant comme « un simple soldat sur le front ». Pour sa dernière intervention, l’accusé cite un ensemble de citations et références disparates – parmi lesquelles Nietzsche, Montaigne, Staline, Roosevelt ou encore Poutine – dans un réquisitoire contre l’Occident, avec comme cible privilégiée : les États-Unis. « Daesh, à côté, c’est un petit joueur », lâche-t-il.

À ses côtés, quatre autres terroristes appartenant au groupe État islamique (EI), eux aussi jugés pour avoir enlevé et séquestré quatre journalistes français en Syrie, en juin 2013. Parmi eux : le grand reporter Didier François et les photographes Édouard Elias, Nicolas Hénin et Pierre Torres. Ils séquestreront par la suite de nombreux autres journalistes et humanitaires occidentaux.

Édouard Elias avait 22 ans lorsqu’il a été enlevé par le groupe terroriste. Le 19 février dernier, il est le premier ancien otage de l’État Islamique à témoigner et retranscrire toute la dureté de sa détention par le groupe État islamique. Il raconte avoir assisté à « un abattage systématique de Syriens » , « une machine, une horreur absolue », et « continuellement, aux cris de gens en train de mourir ». Les otages sont « privés de nourriture et frappés », leurs visages sont « littéralement bleus ».

Tous ne survivent pas. Le journaliste américain James Foley et l’humanitaire britannique David Haines sont exécutés. La mise à mort par décapitation du journaliste est diffusée sur YouTube par EI, dans une mise en scène macabre. Un mois après le retour en France des quatre survivants, le 24 mai 2014, Mehdi Nemmouche assassine quatre personnes au musée juif de Bruxelles.

Était-il « Abou Omar », l’un des tortionnaires des ex-otages en Syrie ? Si le principal intéressé continue de répondre par la négative, pour Édouard Elias, il n’y a pas l’ombre d’un doute : il « reconnaît formellement » la voix de l’accusé, celle qu’il a « entendue en Syrie ». La voix de celui « qui parlait trop, qui parlait tout le temps », raconte-t-il à la barre.

Nicolas Hénin, ancien otage de l’EI, confie auprès de l’AFP avoir au cours du procès « retrouvé la vision du monde totalement binaire » qu’il leur « infligeait durant nos mois dans les sous-sols d’Alep ». « Son objectif est de se faire une place au panthéon du jihad, ajoute-t-il. Le mien, pour ces prochaines années, sera de détruire son image et son discours, j’en fais mon combat personnel ».

« Le fameux Abou Omar n’existe pas, c’est un geôlier virtuel », une « construction kaléidoscopique », conteste Me Vuillemin, l’avocat de Medhi Nemmouche. Il est « le résultat du mixage de plusieurs geôliers » par des victimes à la « recherche d’un coupable idéal », défend-il.

Après plus de dix heures de délibéré, la cour d’assises spéciale de Paris reconnaît Mehdi Nemmouche, 39 ans, coupable d’avoir détenu quatre journalistes français pour le groupe État islamique en Syrie en 2023. Il est condamné à la prison à perpétuité assortie d’une période de sûreté de 22 ans.

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